Retours sur l'action du 29 novembre contre les violences faites aux femmes

Un samedi de luttes à Saint-Denis.

Un samedi matin, à 10h00 : rendez-vous dans un café de la ville, proche du lieu de notre rassemblement pour les derniers préparatifs. Un samedi matin, à Saint-Denis, ça grouille de monde. Des jeunes jouent à la balle sur la grande place devant le Cinéma l’Ecran. Enfants, femmes, hommes, familles dehors. Le froid est arrivé, on se réchauffe le corps avec nos boissons chaudes et le cœur avec la répétition des chants et slogans que nous allons scander durant ce rassemblement.

On attend les copines de la CSP 93 (coordination des sans-papiers) qui sont partie prenante de cet événement et avec qui des liens de solidarité et de lutte ont été tissés depuis un moment déjà. On commence à s'installer.

Mais de quel événement s’agit-il ? On est le 29 novembre et nous avons choisi ce week-end pour honorer la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes fixée au 25 novembre.

Et c’est à Saint-Denis, ville du département de la Seine-Saint-Denis, où nous avons voulu être naturellement présentes. Le 93 est notre maison, c’est l’endroit où nous habitons, où nous travaillons, où nous luttons. C’est aussi un espace d’expression populaire, un espace d’expérienceS de vieS populaires, là où s’articulent, dans la lutte, classe, race, genre.

À femmes en lutte 93, nous revendiquons une parole féminine face aux violences que nous les femmes, avec nos spécificités respectives (origine, orientation sexuelle, confession religieuse), subissons dans les quartiers populaires, face à l’Etat, face à la police, face au capitalisme, à la précarité, face à la domination masculine qui cherchent à nous maintenir la tête sous l’eau. Mais nous ne nous noierons pas. Bien au contraire, nous gardons la tête hors de l’eau, dignement, quotidiennement. Chaque jour a son lot de luttes et de résistance.

Pour la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, on a créé des ponts. Là où certain-e-s dressent des murs, nous construisons des ponts, en échangeant à travers nos chants, nos slogans, nos discours, nos discussions. Des violences, il y en a à dénoncer, des violences sociales qui se mêlent à des violences intimes, faites sur nos consciences et nos corps.

Micros en place, guitare à la main d’une copine FEL93 et derbouka, c’est parti.   Collectivement, nous avons exprimé notre rage. Et cette rage, elle traverse les frontières.

Nos copines sans-papiers en choeur avec nous ont pris le micro, ont parlé, chanté et crié les slogans élaboré collectivement. Elles, qui se battent pour obtenir une régularisation et le droit de circuler librement sur ce territoire mais qui se battent aussi pour leurs familles, forcent le respect.

Nos camarades kurdes et turques sont intervenues et ont évoqué leur combat pour l’émancipation de leur peuple et leur autodétermination.

Nous avons entonné un chant de solidarité pour les femmes palestiniennes et le peuple palestinien dans son ensemble qui résiste depuis plus de 66 ans contre l’occupation, les crimes israéliens.

Notre solidarité féminine est une solidarité de classe et elle est internationale.

Les gens étaient au rendez-vous. Très vite, un attroupement s’est constitué. Le « nous » s’est agrandi. Il y avait des femmes, des enfants mais aussi des hommes solidaires. Parce que nos actions, si elles sont organisées par les femmes et pour notre émancipation, elles nous concernent toutES et touS. Nous partons en manifestation dans Saint-Denis ! 

Ce samedi 29 Novembre, nous étions place du Caquet, et nous avons vécu un moment de luttes et de solidarité. Avec toutes les difficultés que nous subissons, et particulièrement dans le 93, y’a pas à dire, ça fait du bien de se rassembler, d’être ensemble, ça libère une énergie positive. On se sent mieux. C’est toujours ça de gagner dans l’adversité.

Ce jour-là, nous n’étions pas dans l’ombre. Nous étions dans la lumière. Cette lumière, elle émane de nous, du peuple.

Le slogan de la CSP « Sortons de l’ombre pour vivre libre » et celui de Femmes en lutte 93 « ni victimes ni invisibles »  ne sont pas des paroles déclamées le temps d’une manif, il est un art de vivre et de combattre.